Vendredi 30 janvier, les télésièges débrayables six places de l’Aiguille du Fruit et de la Forêt, sur Courchevel, ont officiellement été inaugurés. L’occasion pour Pascal de Thiersant, président du directoire de la Société des 3 Vallées (exploitant des domaines skiables de Courchevel, la Tania et Mottaret), de faire le point sur le Plan Pluriannel d’Investissement (PPI) et les grandes orientations des années à venir.
Confort, rapidité, respect de l’environnement. Tels sont les trois critères majeurs qui ont prévalu à l’aménagement des deux nouveaux télésièges débrayables six places de l’Aiguille du Fruit et de la Forêt. Le premier a coûté 8 millions d’euros et permet d’améliorer la liaison entre Courchevel-Moriond (1650) et Courchevel 1850, limite l’impact paysager de façon spectaculaire. En remplaçant deux télésièges (Gravelles et Aiguilles du Fruit) par un seul, on passe de 30 à 11 pylônes. Et ce sans diminuer le débit horaire, qui atteint 3300 skieurs /heure sur ce nouveau télésiège de l’Aiguille du Fruit. La différence entre l’ancienne télécabine de la Forêt et le nouveau télésiège débrayable six places à bulles qui la remplace (coût : 9 millions d’euros) est encore plus spectaculaire, avec un débit horaire porté de 1000 à 2400 skieurs/heure. Légèrement différente de celle de l’ancienne télécabine, la ligne de ce nouveau télésiège permet du « skis aux pieds » sans déchausser sur les secteurs du Praz (Courchevel 1350) et de la Tania, et ainsi de valoriser le ski en forêt proposé sur ces secteurs. Elle améliore nettement la desserte de la Tania depuis le Praz, la rendant plus rapide.
Rationalisation du domaine skiable
« Avec notre PPI sur dix ans – 2012-2022 – nous poursuivons l’objectif d’avoir des stations avec des remontées mécaniques de qualité, à la fois rapides et confortables. Les deux télésièges débrayables que nous venons d’inaugurer s’inscrivent parfaitement dans cette démarche de rationalisation du domaine skiable. Ce qui permet accessoirement des économies d’énergie. Par exemple, sur l’Aiguille du Fruit, nous avons diminué notre consommation d’électricité de 20 % », indique Pascal de Thiersant, le président du directoire de la Société des 3 Vallées (S3V).
Cette rationalisation chère à Pascal de Thiersant se traduit par la diminution du nombre de remontées mécaniques, grâce à la construction d’appareils plus performants. Le plus bel exemple de cette politique est le projet de réaménagement du front de neige de Courchevel Moriond. Celui-ci verra le remplacement des cinq remontées actuelles (une télécabine six places, un télésiège et trois téléskis) par deux appareils (une télécabine et un télésiège débrayable). Initialement prévu pour 2016, il devrait avoir du retard, « en raison de complications administratives. On devrait a priori remplacer la télécabine actuelle six places d’Ariondaz par une télécabine avec des bennes de douze places, mais rien n’est encore arrêté. Cela étant, nous avons su adapter notre calendrier d’investissements. C’est pourquoi le télésiège débrayable de l’Aiguille du Fruit a vu le jour dès cet hiver, alors qu’il était prévu à l’origine pour 2018 », explique le président du directoire de la S3V. Et d’ajouter que la bonne marche de ce PPI – 200 millions d’euros sur 10 ans, soit 20 millions par an, pour un chiffre d’affaire annuel de 60 millions par an pour la S3V – nécessite « d’inverser la courbe de fréquentation des stations de ski gérées par la S3V. Alors que nous comptabilisions 2 millions de journées-skieurs en 2001, nous sommes tombés à 1,6 millions en 2014. »
Progresser sur les offres packagées
La solution repose sur plusieurs leviers. L’un d’entre eux concerne une meilleure commercialisation de la destination « Courchevel – La Tania – Méribel-Mottaret ». « Nous sommes concurrencés par les destinations au soleil, en particulier à Pâques. Il faut dire qu’il est beaucoup plus simple de réserver un séjour au soleil en quelques clics sur le web. Pour réserver à la neige, c’est davantage un parcours du combattant, avec le transport, l’hébergement, la location de matériel ou encore les cours de skis dont il faut s’occuper successivement et séparément. Nous avons beaucoup de progrès à faire afin de proposer davantage de packages. Nous voulons aussi mieux connaître le client et le fidéliser. Nous nous devons d’être plus présents entre mars et octobre », estime Pascal De Thiersant.
La chasse aux lits froids – utilisés moins de trois semaines par an, qui représentent par exemple 62 % de l’ensemble des lits sur Mottaret – est un autre levier. C’est dans cette optique que la S3V a créé Affiniski, une filiale immobilière qui a pour objet la valorisation et la rénovation de l’immobilier touristique à Courchevel, Mottaret et La Tania.
« Sur Courchevel comme sur Méribel, il faut savoir qu’il n’y a plus de PLU, ce qui signifie concrètement au moins trois ou quatre ans sans possibilité de construire du neuf. Dans ce contexte, la création d’Affiniski nous est apparue comme une évidence. Affiniski se compose de trois volets : des rénovations clés en mains ; des possibilités de financement, grâce à des accords de partenariats entre la S3V et l’organisme de crédit Sofinco (groupe Crédit Agricole) ; une optimisation de la transmission de patrimoine, même si nous devons encore en définir les modalités exactes », détaille le président du directoire de la S3V. Sachez que la partie locative est assurée par les agences immobilières et hébergeurs de la station qui ont choisi d’être partenaires d’Affiniski. La S3V a déjà acquis, rénové et revendu deux résidences de tourisme, ce qui a permis la réintroduction sur le marché de plus de 400 lits. Elle a aussi acquis, rénové et mis en location 70 appartements. « Le lancement d’Affiniski devrait permettre de rénover 30 appartements en 2015, puis 40 appartements en 2016, pour atteindre le rythme de 50 rénovations par an à partir de 2017 », indique Pascal Vie, le directeur financier de la S3V et gérant d’Affiniski.
Nouveau restaurant d’altitude
Le lancement de cette filiale immobilière témoigne de la volonté de la S3V de « montrer la voie aux autres acteurs de la station. Nous devons avoir un rôle moteur, mais nous ne pouvons pas tout faire tout seul », a rappelé Pascal de Thiersant. Ce qui peut expliquer que l’exploitant du domaine skiable s’implique au-delà de son métier premier, par exemple en lançant un nouveau restaurant d’altitude à Mottaret, baptisé Le Plan des Mains. « Les enquêtes de satisfaction ont montré un mécontentement de notre clientèle par rapport au prix des restaurants, à leur rapport qualité/prix. Nous avons créé ce restaurant afin d’y remédier (les prix, à la carte, étant compris entre 11 € pour l’entrée la moins chère et 29,50 € pour le plat le plus cher, des spaghettis de Saint-Jacques et Crevettes à la crème safranée, ndlr). Nous avons aussi monté Food Altitude, une sorte de coopérative, pour mutualiser les achats, afin d’avoir une qualité homogène et des prix bas. Six autres restaurants d’altitude y ont d’ailleurs adhéré », se félicite le président du directoire de la S3V. L’exploitant du domaine skiable espère aussi que ce nouveau restaurant d’altitude, offrant une vue imprenable sur le Mont Vallon, permettra d’augmenter le flux de skieurs en provenance de Val Thorens. Un enjeu important quand on sait que la répartition des recettes des forfaits 3 Vallées est liée à la fréquentation enregistrée sur les remontées mécaniques des différents exploitants (S3V, Méribel Alpina, la Setam pour Val Thorens, la Sevabel pour les Menuires et Saint-Martin-de-Belleville, la STOR pour Orelle).
En résumé, la S3V a profité de l’inauguration officielle des deux télésièges débrayables de la Forêt et de l’Aiguille du Fruit pour rappeler sa volonté de rester dans le peloton de tête des stations de ski françaises et internationales.
Martin Léger