Station de ski en Chine ©Cluster Montagne

L’Asie, l’autre continent du ski

Le rideau vient tout juste de tomber sur les 23e jeux olympiques d’hiver de Pyeongchang. La Corée du Sud a donc passé le flambeau à la ville de Pékin, où les 24e auront lieu en février 2022. A la clé de ces deux événements, un boom de l’économie des loisirs et du tourisme hivernal en Asie. Et de belles perspectives pour la montagne tricolore sur cet autre continent du ski. Les explications de Benoît Robert, directeur du Cluster Montagne, dont une délégation était présente au pays du Matin calme pour rencontrer les fédérations internationales de ski.

Actumontagne : Les tribunes étaient loin d’être pleines à Pyeonchang pour les épreuves de ski. Vous l’avez constaté sur place ?
Benoît Robert
: Effectivement, il n’y a pas eu l’engouement populaire escompté pour les épreuves de ski alpin et de ski de fond. Et nos amis Coréens n’ont pas essayé de remplir les tribunes avec des scolaires, comme nous le faisons nous parfois, en estimant que les jeunes sont nos skieurs et nos champions de demain ! Mais, les JO sont avant tout un événement médiatique considérable. Ensuite, il faut distinguer le ski (alpin et nordique), des sports de glace, dont les Coréens sont très fans. Avec la délégation française du Cluster Montagne, nous avons assisté à des matchs de hockey et à des épreuves de patinage, et là, il y avait vraiment de la ferveur populaire ! En fait, il va se produire en Corée du Sud le même phénomène qu’en France avec les JO de Grenoble en 1968. Ils ont permis de démocratiser le tourisme hivernal et la pratique du ski.

La délégation du Cluster Montagne aux JO de PyeongChang : Terry Cheongyyung (Poseidona), Frédéric Marion (CDA), Dora Martin (Géode), Jean-Marc Farini (CDA), Delphine Pons (CDA), Agnès Pannier-Runacher (CDA), Martin Francou (MND), Hubert Escudero (Géode), Frédéric Gaimard (Géode) et Benoît Robert (Cluster Montagne) ©Cluster Montagne

Actumontagne : Quel est donc le potentiel du ski en Corée ?
BR
: Pour l’instant, seuls 6% de la population coréenne pratiquent le ski, mais les JO vont dynamiser la discipline et accélerer la fréquentation de ses stations de montagne, dont 16 sont au niveau des standards internationaux. Elles présentent une offre touristique quatre saisons car les Coréens sont très attirés par les loisirs nature, l’outdoor, dont la Corée représente le premier marché mondial. Dans leur communication, les stations coréennes invitent les Coréens à venir chez elles pour pratiquer leurs activités traditionnelles (karaoké, casino, baignade), mais elles les incitent aussi à consacrer deux ou trois heures à pratiquer des activités sportives en milieu naturel. Les Coréens viennent en station après le travail et c’est pour cela, que le ski nocturne est plébiscité.

Actumontagne : Quid du Japon, où deux olympiades ont eu lieu, Sapporo en 1972 et Nagano en 1998, marché pionnier du ski en Asie ?
BR
: Le Japon était le plus grand marché du ski mondial dans les années 80/90 (pic de fréquentation en 1990 avec 70 millions de journées skieur), ensuite, il s’est effondré avec la crise économique et parce que le ski n’était plus tendance. Depuis quelques années, le secteur de la montagne reprend de la vigueur avec de nouveaux projets immobiliers – notamment deux nouveaux Club Med dans les stations de Tomamu et Sahoro -, des liaisons inter-stations, une réorientation quatre saisons de l’offre, ou encore un plan gouvernemental de soutien aux activités de montagne. Nous sommes sollicités pour rénover les plus belle stations, notamment dans les Alpes japonaises ou sur les montagnes de l’île d’Hokkaïdo.

Benoît Robert, directeur du Cluster Montagne ©DR

Actumontagne : Justement, l’industrie française de la montagne, présente en Asie depuis 40 ans, a donc de nombreuses opportunités sur ce continent. La concurrence est rude non avec les Autrichiens ?
BR : Il y a trois intervenants que l’on retrouve partout dans le monde : le Canadien Ecosign dans l’ingénierie, l’Autrichien Doppelmayr dans les remontées mécaniques et l’Italien TechnoAlpin dans la neige de culture. Chez eux, ils sont en situation de quasi-monopole, si l’on excepte Leitner également italien. Il n’ont pas de logique de filière. En France, nous avons au contraire, une grande diversité d’acteurs dans tous les métiers de l’aménagement de la montagne, du bureau d’études à la gestion des domaines skiables. Et cette offre variée, fédérée et innovante est un atout face à nos concurrents autrichiens, nord-américains ou italiens. A Sotchi, par exemple, où toutes les infrastructures étaient à créer, 17 entreprises françaises ont contribué à l’aménagement des sites olympiques !  C’est le fruit d’une présence qui remonte au tout début des années 2000.

Le site Alpensia ©Cluster Montagne

Actumontagne : Et pour PyeongChang 2018 et Pékin en 2022 ?
BR
: Pour les JO de PyeongChang, peu d’entreprises françaises ont participé aux aménagements parce que la Corée a créé peu d’infrastuctures à cett occasion, à l’exception notable du site de ski alpin. En Chine, nos entreprises travaillent quotidiennement ce marché depuis trois ans. Mais nous nous projettons au-dela des JO de Pékin parce qu’il y a de multiples projets dans cet immense pays. Rien qu’en 2016, 50 nouvelles stations ont vu le jour en Chine ! Elle dispose des montagne les plus hautes du monde et vise les 300 millions de skieurs par an d’ici quelques années. Elle va devenir la destination ski et outdoor majeure dans la région. Nous regardons aussi d’autres pays, comme la Turquie qui a manifesté son intention d’accueillir les JO d’hiver de 2026 et souhaite que nous l’accompagnons. Nos entreprises avaient largement contribué à l’accueil des Jeux d’hiver asiatiques en 2011 à Erzurum. A Pyeongchang, nous avons visité les installations avec les représentants turcs de  la fédération de ski et vu avec eux les points forts et les points faibles de chaque installation. Si en 2019, la Turquie obtient les JO, nous serons bien placés !

Propos recueillis par Sophie Chanaron

L’Inde bientôt
« Avec les montagnes parmi les plus hautes du monde, vantées par nos freeriders qui vont y tourner des vidéos époustouflantes, l’Inde est un marché à fort potentiel à surveiller », estime Benoît Robert. Pour l’instant très tourné sur les pratiques estivales de la montagne, le pays va développer les activités hivernales à moyen et long terme. L’élévation du niveau de vie est continue et une culture des loisirs est en train de naître en Inde, dont la population dépassera bientôt celle de la Chine. Le Cluster Montagne pose des jalons et organise en mai prochain à Delhi, les  Premières Rencontres Franco-indiennes de la Montagne.

 

 

 

 

 

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