Il est le funiculaire le plus pentu des Alpes françaises, et parmi les plus vieux du monde encore en exercice. Construit pour acheminer les matériaux de construction des premiers sanatoriums du Plateau des Petites-Roches, à Saint-Hilaire-du-Touvet, ce modèle exemplaire de transport par câble fête les 90 ans de sa mise en service. Une exploitation plus que jamais d’actualité, à l’heure où la mobilité douce est un enjeu de société.
Le funiculaire transporte près de 45 000 passagers par an. Parmi eux, des adeptes du vol libre, bien sûr, le site étant depuis la fin des années 70, un haut lieu mondial de la discipline. Des randonneurs également, piétons ou, depuis cet été, à deux roues, à qui il donne un accès privilégié au Parc naturel régional de Chartreuse. Enfin, de nombreux voyageurs contemplatifs embarquent dans ses cabines en bois vintage pour le simple plaisir de frissonner le temps de son parcours à flancs de falaise. Notamment lors du passage dans le tunnel, qui avec une pente à 83%, reste à ce jour le plus incliné au monde pour un chemin de fer à vocation commerciale.
Depuis 2010, sous l’impulsion du Parc naturel régional de Chartreuse, et avec le soutien financier de la Communauté de communes du Grésivaudan et du Conseil général de l’Isère, la gare haute a été complètement rénovée. Elle abrite un espace muséographique, le laboratoire d’Icare, dédié à l’essor du vol libre sur le site et à la découverte du territoire, plus un restaurant panoramique. Le tout forme un ensemble moteur pour le développement touristique du Plateau des Petites-Roches.
D’importants travaux sont engagés depuis 2011 par la régie des Remontées mécaniques de Saint-Hilaire-du-Touvet pour réhabiliter les ouvrages d’art du funiculaire et ses abords. Le câble a également été changé cette année. Ces travaux avoisinent les 450 000€, pris en charge par la régie, complétés par des subventions des collectivités territoriales (CC du Grésivaudan et CG38).
Un bel été 2014
Muscler l’offre du site paie. La preuve, en dépit d’un été 2014 pluvieux, la fréquentation a grimpé de 7,5% pa rapport à l’an dernier, et Christophe Martinet, le directeur de la régie, table sur une croissance à deux chiffres pour l’exercice complet. « Les gens ne viennent plus pour la seule montée en funiculaire. Ils viennent aussi profiter du Laboratoire Icare, du ballet des parapentistes, des sentiers et notamment, celui sonnorisé des Doux », détaille l’exploitant, pour qui les habitants de la vallée, vivant entre Grenoble et Montmélian, restent les meilleurs ambassadeurs du site naturel du funiculaire. « Ils viennent et reviennent au funiculaire pour le faire découvrir à leur famille, leurs amis et visiteurs, contribuant à l’essor de la fréquentation ».
A venir la saison prochaine, une boutique en gare haute de 40 m², dans laquelle on trouvera des produits au logo du funiculaire et de la Coupe Icare, ainsi que ceux des artisans de la route des savoir-faire de Chartreuse, dont le funiculaire est membre. « Il y a aussi le projet de développer une offre de vélos électriques à l’arrivée du funiculaire, pour faciliter la découverte du plateau à un public moins sportif », indique Eliane Giraud, présidente du Parc naturel de Chartreuse, qui rappelle que si le parc n’est pas un financeur des actions, il accompagne les porteurs de projets pour accroître l’attractivité des lieux. « Le Parc est mobilisateur de financements qu’il va chercher auprès de la Région et de l’Union européenne », rappelle la sénatrice de l’Isère, vice-présidente de la Région Rhône-Alpes, déléguée aux transports, déplacements et infrastructures.
Un transport public pertinent ?
Autre investissement d’envergure envisagé, la requalification de la gare basse de Montfort, plus adaptée à la fréquentation du site, avec l’amélioration de l’accueil et de la circulation des passagers dans le bâtiment, et la refonte du parking, aujourd’hui saturé. « Décision courant 2015 », indique Christophe Martinet. « Si nous bouclons les finacements, les travaux pourraient démarrer l’année suivante avec leur achèvement possible courant 2017 ».
Trait d’union entre la vallée et le plateau, le funiculaire pourrait-il sortir de sa vocation touristique, et être intégré dans le réseau de transports publics du territoire, comme certains habitants et élus, l’appellent de leur voeux ? Une bonne idée sur le principe, à l’heure de la mobilité douce, « mais compliquée à mettre en oeuvre pour plusieurs raisons, notamment juridiques et tarifaires », explique Francis Gimbert, le président de la CC Le Grésivaudan, soulignant en plus, le manque de compétitivité du funiculaire par rapport à la voiture sur le trajet.
« Effectivement, le funiculaire actuel ne peut pas accéder à la vitesse et aller au-delà d’1m25 à la seconde (à comparer aux 6 mètres/seconde d’un télésiège !). Il faut donc compter 20 mn de temps de parcours, et cela juste pour le funiculaire », explique Christophe Martinet. « Pour un habitant du col de Marcieu qui travaille à Crolles ou à Grenoble, par exemple, il y a trop de ruptures de charge, entre sa venue jusqu’à la gare haute, l’attente en gare, l’attente de la correspondance, pour qu’il opte pour le funiculaire plutôt que sa voiture ». L’intégration de ce transport par câble dans le réseau de transports publics du Grésivaudan supposerait donc de changer complètement l’outil. Un investissement prohibitif au regard de la population concernée.
Avec ses cabines aux quatre vents, qui expliquent en partie son exploitation aux seuls beaux jours, le vénérable nonagénaire de Saint-Hilaire, restera encore longtemps un fleuron du patrimoine ferroviaire touristique.