Petit Poucet dans un univers dominé par des géants industriels, la coopérative du Val d’Arly se bat au quotidien pour que les producteurs laitiers gagnent correctement leur vie et puissent rester en montagne. Et ainsi, contribuer à l’attractivité touristique de ce territoire de Savoie Mont-Blanc.
Même si les collectes de lait compliquées de l’hiver dernier -abondantes chutes de neige et routes coupées en montagne-, ont éprouvé les équipes pendant plusieurs semaines et pesé sur bilan comptable de l’entreprise, Philippe Bouchard, le directeur de la Coopérative fruitière du Val d’Arly, a le sourire. La structure collective laitière ne connaît pas la crise ! Sa stratégie de diversification, entamée il y a trois ans paye. “Il s’agit d’aller chercher de la valeur pour rémunérer au juste prix les agriculteurs de montagne qui ont fait le pari de la qualité”, souligne cet ancien fromager francomtois, qui a l’entière confiance de ses patrons, à savoir les quelque 80 producteurs laitiers adhérents de Savoie et de Haute-Savoie !La coopérative de Flumet a développé de nouveaux produits, notamment des yaourts, et en a d’autres en cours d’élaboration. Elle a aussi multiplié les débouchés pour ses fabrications maison, reblochon, beaufort et yaourts en tête, en misant sur différents canaux de distribution.
Son obsession : récupérer de la valeur. Comment ? En privilégiant les circuits courts et en limitant les intermédiaires entre les paysans et les consommateurs. Ainsi, après avoir lancé ses propres magasins de vente, la coop de Flumet a développé avec succès la vente en direct auprès des professionnels de la restauration, nombreux dans cette région alpine très touristique.
Négociation avec la grande distribution
Aujourd’hui, la structure collective de Savoie Mont-Blanc va encore plus loin. Elle a entrepris de négocier avec les enseignes de la grande distribution. Un circuit de distribution incontournable : en France, quatre fromages sur cinq sont vendus dans les grandes et moyennes surfaces. Mais avec des produits 15% plus chers que la majorité de ses concurrents, la coopérative du Val d’Arly peut-elle espérer entrer dans les rayons de points de vente connus pour tirer les prix vers le bas de leurs fournisseurs ?
La nouvelle loi sur l’agriculture et l’alimentation, tout juste votée au Parlement et qui vise à rééquilibrer les relations commerciales entre producteurs et distributeurs, plaide en son sens. La démarche fait tousser les grossistes privés, interlocuteurs privilégiés des acheteurs des grandes enseignes. Mais le vent est en train de tourner. Ces derniers, en écho aux attentes du consommateur, manifestent un intérêt croissant pour le terroir, le local, les petites productions et surtout la qualité.
La petite coopérative savoyarde a par ailleurs répondu à des appels d’offre de gros donneurs d’ordre publics. Avec réussite puisqu’elle a décroché la fourniture de yaourts et fromages pour l’économat des armées et pour les lycées d’Auvergne-Rhône Alpes. Pour cette commande substantielle, elle s’appuie sur Mont et Terroirs, société fromagère et d’affinage dédiée aux fromages AOP et IGP, dont elle est détient 35% du capital, aux côtés de plusieurs coopératives de Franche-Comté, les 65% restant appartenant à Sodiaal. Une association de raison avec la première coopérative laitière française et qui profite aux producteurs du Val d’Arly.
Sophie Chanaron