Dans le Val d’Arly, terre du reblochon et du beaufort, la coopérative laitière est une véritable institution. Et un modèle de réussite sociale et économique, après une décennie d’investissements et de diversification.
Prix en baisse, coûts de production en hausse, muliplication des normes, suppression des quotas laitiers… le monde agricole est en crise. Partout ? Non ! En montagne, où les conditions de production sont pourtant plus contraignantes qu’en plaine, les agriculteurs ont su très bien tirer leur épingle du jeu. A l’image de la coopérative laitière du Val d’Arly, qui a la particularité d’être à cheval sur les zones des deux AOP phares des Savoie, le reblochon et le beaufort. Si elle a traversé des hauts et des bas jusqu’au milieu des années 2000, depuis, l’entreprise collective affiche une croissance continue.
Sous l’impulsion de son directeur Philippe Bouchard, arrivé en 2006, elle a opéré une profonde mutation, passant en moins d’une petite décennie de 20 employés à plus de 60, dont 50 à l’année. Même orientation à la hausse pour son chiffres d’affaires, qui a bondi de 5 à 15 millions d’euros.
7 millions d’euros investis
Ce fromager qui a dirigé de nombreuses structures coopératives ou privées, a su convaincre les sociétaires de la coop de Flumet de jouer la carte de la diversification des produits et des canaux de distribution.
La création de nouveaux produits laitiers a été possible grâce à la récupération de volumes de lait apportés par de nouveaux sociétaires. En 1969, la coop collectait 500 000 litres de lait par an. Aujourd’hui, cette collecte dépasse les 13 millions de litres ! Un or blanc des alpages qu’elle transforme en reblochon et en beaufort, et, depuis deux ans, en yaourts et faisselles, ou encore en fromage pour “ La Fondue de Chez Nous ». Pour ce faire, elle a investi environ 4 millions d’euros dans son outil de production. Trois autres millions sont allés dans la vente directe, créneau sur lequel elle a mis les bouchées doubles, développant son propre réseau de magasins ouverts 7 jours sur 7 (Flumet, Megève, Chamonix, Faverges et bientôt Cluses) et en misant bien évidemment sur Internet.
Elle sert par ailleurs la grande distribution à travers des gammes spécifiques, et a également créé un service sur mesure à destination des restaurants et collectivités du territoire.
Acteur impliqué localement
En 10 ans, la petite coopérative de Flumet, propriété de quelque 80 sociétaires, a changé de dimension, et collabore en partenariat avec les Coopératives de Franche-Comté, avec Monts & Terroirs, filiale de la première coopérative laitière française, Sodiaal, « tout en restant vigilante sur la qualité et sur les volumes, pour garantir à ses sociétaires-paysans un prix du lait rémunérateur« , souligne Philippe Bouchard. Il le rappelle à l’envi, la coop doit faire vivre le territoire, en fédérant ses acteurs. Elle a par exemple joué un rôle décisif dans la réouverture de l’abattoir de Megève, permettant de structurer une filière de viande locale. Pas étonnant au regard de sa réussite, qu’elle soit aujourd’hui sollicitée pour recréer des fruitières ailleurs dans les Pays de Savoie.
Sophie Chanaron