©Parc national de la Vanoise/Marie-Laure Tonnelier

Le drone au secours des rapaces en Vanoise

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Grande première en France sur les hauteurs du lac du barrage de Tignes : la pose par un drone de balises de protection des grands oiseaux sur une ligne électrique non accessible par les techniques habituelles. Une opération organisée dans le cadre de la convention entre Enedis et le Parc national de la Vanoise, en faveur de l’avifaune, ainsi que le programme européen Life GypHelp. Les défenseurs et les admirateurs de l’emblématique gypaète barbu se réjouissent des perspectives de cette solution alternative pour le protéger lui et les autres grands rapaces alpins.

Avec plus de 15 ans d’expérience, le Parc national de la Vanoise fait référence dans le domaine de la visualisation des câbles aériens. En France, mais aussi à l’étranger. La chargée d’étude du programme câbles au parc, Sandrine Berthillot, est reconnue comme l’une des spécialistes mondiales des dispositifs de visualisation avifaunes. C’est sous sa houlette et grâce à sa perspicacité, que des balises équipent plusieurs câbles de lignes électriques ou de remontées mécaniques. Ces derniers constituent des dangers majeurs pour les espèces emblématiques de nos Alpes, le tétras-lyre ou le fameux gypaète-barbu. Ce vautour, dont 10 couples-reproducteurs sont sédentarisés dans les Alpes (4 en Vanoise), bénéficie du programme européen Life GyHelp (2014-2018), déployé dans départements alpins par Asters avec ses partenaires, dont le Parc national de la Vanoise.

©PNV/Régis Jordana
Ce rapace, éradiqué dans les Alpes françaises par l’homme au début du XXe siècle, a beau avoir une vue perçante pour repérer ses proies – sa vision est deux fois et demi supérieure à la nôtre-, il ne détecte pas les câbles installés en travers de son aire de vol.
Les dispositifs d’éffarouchement et de visualisation déployés par le Parc de la Vanoise, Enedis (ex ERDF) et les exploitants de remontés mécaniques, ont montré leur efficacité. « Les balises visuelles ont permis de diminuer de 65 à 95% le nombre d’accidents par percussion », indique Sandrine Berthillot. Ils ont été installés sur les poteaux et les conducteurs de ligne électrique, par nacelle ou par perche, parce qu’accessibles. « Nous n’avions pas de solution pour neutraliser les infrastructures, dangereuses ou potentiellement dangereuses, en milieux extrêmes ».  C’est désormais envisageable, grâce au recours à un drone.

Sandrine Berthillot, spécialiste mondiale des balises avifaunes
La démonstration a été faite le 5 octobre dernier, sur une ligne à moyenne tension au-dessus du barrage de Tignes, proche du site de nidification du couple de gypaètes de Val d’Isère, également fréquenté par l’aigle royal ou le vautour fauve. Un engin téléguidé depuis le sol a posé avec une dextérité déconcertante plusieurs balises visuelles sur des conducteurs situés à plus de 30 mètres de haut, sur un terrain très escarpé.

Neutralisation classique d'un poteau électrique en Vanoise par une équipe d'Enedis
Cette solution technique inédite en France, proposée par le fabricant des balises Firefly, le Suédois Hammarprodukter et son partenaire slovaque e-Sense, se révèle simple à mettre en oeuvre et rapide.  A la clé, une fois la machine industrialisée, une intervention économique pour ce type de tâches, qui doit composer avec les courants thermiques. « Elle demande encore quelques mois de réglages pour entrer en phase opérationnelle à plus grande échelle », précise Eva Aliacar, la présidente du parc, pour qui elle ouvre des perspectives très intéressantes et pas seulement en Vanoise. « Cette solution technologique va venir en complément des solutions classiques dans lesquelles nos équipes disposent d’un savoir-faire reconnu », précise Sylvian Herbin, directeur régional d’Enedis Alpes, où les drones d’inspection sont déjà très utilisés. « Nous allons disposer en interne d’une flotte d’engins pour l’inspection des ouvrages. Pour la pose de balises sur des conducteurs en milieux extrêmes, nous aviserons, car elle nécessite un geste et du matériel particuliers, qu’il peut être plus pertinent de laisser à des spécialistes, plutôt que de les intégrer ».

Sylvian Herbin, directeur régional d'Enedis Alpes, Eva Aliacar, directrice du Parc de la Vanoise, Serge Revial, 1er adjoint de Tignes et Laurent Trésallet, président du PNV et maire de Peisey
Cette première technologique du Villaret du Nial à Tignes s’inscrit dans le cadre de la convention de partenariat en faveur de l’avifaune, liant depuis 2012, le Parc de la Vanoise, Enedis, la Ligue de Protection des Oiseaux Savoie, le Parc naturel régional des Bauges et celui de la Chartreuse. Enedis Alpes, qui exploite 42 000 kilomètres de lignes électriques sur les trois départements nord-alpins (dont 60% de ce réseau en souterrain), apporte une aide de 75 000 euros pour trois ans. Cette enveloppe sert à financer l’identification des zones les plus sensibles, l’installation de systèmes de neutralisation des infrastructures critiques, ainsi que l’activité des comités de pilotage.

De nombreux partenaires impliqués et motivés pour la préservation du gypaète barbu et des grands rapaces et gallinacés des Alpes

A ce jour, sur les deux départements savoyards, 85 poteaux ont été neutralisés par des dispositifs dissuadant les oiseaux de s’y percher et de s’électrocuter. De même, plus de 7 km de lignes ont été équipées de balises visuelles pour pallier le risque de percussion.

SC

photo Une ©Parc national de la Vanoise/Marie-Laure Tonnelier



 

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