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La Bouitte ou la cuisine à quatre mains

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Les gourmets du monde entier connaissent La Bouitte, deux étoiles au Michelin depuis 2008. Sise dans la vallée des Belleville, la plus discrète des fameuses 3Vallées, cette belle maison familiale sobre et raffinée, doit sa notoriété à son duo de chefs, René Meilleur et son fils Maxime. Deux autodidactes aux tempéraments complémentaires, qui mitonnent avec brio et malice, une cuisine du terroir, aussi légère qu’inventive.

Les fans espéraient que La Bouitte, petite maison en patois savoyard, décroche en 2012 sa troisième étoile, année de ses 35 ans. Ils devront encore patienter car la dernière édition du guide Michelin, sortie fin février, n’a pas répondu à leurs attentes. La bible de la gastronomie française a néanmoins renouvelé ses deux macarons à la table savoyarde, décrochés en 2008. « Il faut en général cinq ans entre la seconde et la troisième étoile », explique Yves Bontoux, consultant en stratégie et marketing touristique et fin connaisseur des arcanes de la gastronomie tricolore.
Alors, 2013 sera-elle l’année de la consécration suprême pour ce restaurant perché sur les hauteurs de Saint-Martin-de-Belleville ? « La 3e étoile n’est pas notre priorité », assurent René et Maxime Meilleur, déjà ravis que La Bouitte ait été adoubée par ses pairs pour entrer en 2012 dans le club très sélect des Grandes Tables du Monde (150 adhérents, 22 pays, 4 continents).  « La 3e étoile viendra quand elle viendra, elle n’est pas vitale pour nous. Mais je suis un compétiteur dans l’âme », concède Maxime, ancien biathlète de haut niveau. « Viser son niveau d’excellence, nous pousse à aller plus loin, plus haut. Ce qui est sûr, c’est qu’elle nous apporterait un vrai confort , avec la possibilité de fermer une fois par semaine. Actuellement, nous sommes ouverts tous les jours de la saison ». Et même si la maison se limite à 45 couverts, brigades et personnel de service sont sur le pont pendant six mois pour ravir le palais d’une clientèle férue de grande cuisine. Une clientèle plus forcément skieuse. La preuve, il n’est pas rare à midi que des clients débarquent en hélicoptère de Paris, de Strasbourg ou de Bâle pour déjeuner à La Bouitte, puis repartent vers leur point de départ, à 700 ou 800 km de là ! C’est dire la cote de la table des Meilleur, véritable « perle gourmande » selon Gilles Pudlowski. Inconditionnel de la maison, le critique gastronomique a été parmi les tous premiers à repérer le tandem talentueux des Belleville et à vanter ses mérites.

Une première étoile en 2003
L’association entre le père et le fils, il y a 15 ans, a incontestablement donné des ailes à La Bouitte, qui était déjà une adresse prisée des locaux. L’expérience de René Meilleur et la créativité exacerbée de son fils Maxime, ont propulsé le restaurant dans la cour des tables gastronomiques de la région. Puis, en 2000, la notoriété atteint la capitale avec le guide Gault Millau qui décerne au restaurant ses clés d’or ; en 2003, la première étoile Michelin tombe. Cinq ans plus tard, une seconde étoile vient récompenser la montée en gamme de La Bouitte, dont la clientèle ne cesse de s’internationaliser depuis. Sur les 8000 clients annuels, 50% sont étrangers et originaires d’une soixantaine de pays. Tous plébiscitent ces deux chefs instinctifs qui, en cuisine, travaillent à quatre mains. « On ne peut pas dire que tel plat est l’œuvre de l’un ou de l’autre », explique Maxime. « Nous nous complétons parfaitement. Aux fourneaux, on n’a pas besoin de se parler pour se comprendre». 
La marque de fabrique des Meilleur, c’est bien sûr l’atmosphère familiale qui règne dans leur chalet douillet, aménagé sans ostentation, et où Marie-Louise Meilleur, l’épouse de René, veille au grain. A l’automne dernier, la Bouitte, qui dispose de chambres d’hôtes  -très convoitées des people en quête d’un havre de paix- s’est encore agrandie et embellie. Un plan d’investissements de 3 millions d’euros répartis sur trois ans. Cette saison, une nouvelle salle a été créée pour apporter plus d’aisance et de confort aux convives, deux chambres d’hôtes supplémentaires sont venues compléter les huit existantes et la cuisine, centre névralgique de tout restaurant étoilé, a gagné en espace. Celle-ci s’étend désormais sur plus de 100 m² et aligne les équipements derniers cris pour stimuler l’inspiration et le savoir-faire des chefs et de leur brigade, soit une vingtaine de cuisiniers ! Un outil indispensable dans la quête de la 3e étoile, selon les spécialistes…


Le choc des textures
A La Bouitte, trois-quarts des commandes relèvent du concept initié en 2008 par la maison, le menu Carte blanche. Les hôtes annoncent leurs préférences culinaires et le nombre de plats qu’ils souhaitent déguster. L’équipe leur compose alors un menu mets-vins en fonction des arrivages du jour.  Autant dire que c’est forcément frais, surprenant pour les papilles, comme pour les yeux, car les Meilleur mitonnent une cuisine du terroir inventive, goûteuse et légère. Le duo joue avec brio des contrastes dans les textures, les couleurs et les saveurs. A l’image de cet œuf poché (photo), accompagné de dés de truite parfumée au shizo et pomelos, et d’un tartare de Saint-Jacques et d’endives, allongées sur un lit de cédrat. Ou encore de ce filet de veau d’une tendresse bluffante, saupoudré de fibres de veau croustillantes, auquel s’ajoutent des haricots cocos à la purée d’ail. Le summum en matière d’opposition de textures, le caramel light en déclinaison, composé d’une tuile croustillante, d’un biscuit moelleux, d’une mousse et d’un coulis au caramel, le tout rafraîchi avec un sorbet citron et feuille de thym…
Côté vins, là-encore, la maison a de la ressource avec une cave abritant plus de 1000 références. Dont les meilleurs crus de Savoie qui n’ont pas de secret pour Florent Cousin, directeur de salle et sommelier, comme ce moelleux blanc appelé Baobab, un chignin bergeron de Louis Magnin ou cet autre blanc Quartz du domaine de l’Ardoisière à Cevins qui feront changer d’avis les derniers sceptiques à l’égard des vins savoyards !
Ne disposant que d’une cinquantaine de couverts, la table de la Bouitte affiche très vite complet. Les Meilleur n’excluent pas d’ouvrir dans un futur proche une brasserie au cœur des Menuires, à quelques kilomètres de là. Une bonne nouvelle pour toutes celles et ceux qui font chou blanc en saison ou pour les gourmets aux petits budgets !
Sophie Chanaron
Menus Carte blanche à partir de 89€ hors vins

Le Biscuiron, le macaron des Meilleur


Deux ans de mise au point et au final un biscuit aussi mignon que bon ! « Le Biscuiron, c’est un macaron façon gâteau de Savoie parfumé au goût du jour», résume avec malice Maxime Meilleur dont le passage chez Lenôtre lui a révélé quelques secrets de pâtisserie. Une mignardise au nom de marque déposé qu’il envisage de commercialiser avec un pâtissier. Elle témoigne de la boulimie créatrice du jeune chef qui planche maintenant sur une religieuse à sa façon, c’est-à-dire aérienne comme la neige qu’il affectionne tant… On en salive d’avance !

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