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Thibaud Duchosal, rider acteur

Quelles sont les conditions de tournage d’un film de glisse ? Décryptage par le pro rider des Arcs Thibaud Duchosal.


Actumontagne.com : Alors qu’« Invincible » est sorti récemment (octobre 2010), vous travaillez déjà sur votre prochain film…
Thibaud Duchosal : Oui, en effet. Le nom de ce film n’est pas encore défini, mais ce sera sur le thème « rêve ta vie, vis tes rêves ». On va partir sur un 26 minutes avec un vrai scénario. Nous allons travailler avec une scénariste professionnelle, jeune diplômée d’une école de cinéma.  Côté glisse, on aura à la fois des séquences de freeride (avec Maxence Cavalade en télémark et moi-même en ski) et de speed riding (avec François Bon, Jérôme Bon mais aussi Maxence Cavalade).

Actumontagne.com : Quelles vont être les conditions de tournage ?
Thibaud Duchosal : Pour les séquences de glisse, on va tourner avec deux cadreurs, à l’aide d’appareils photos qui permettent de filmer en haute définition, les mêmes qui ont notamment servi sur certains épisodes de Docteur House. Chaque rider aura également une caméra embarquée. Un photographe nous accompagnera aussi en permanence. Pour la partie scénarisée, nous aurons un ou deux cadreurs, un opérateur lumière, un preneur de son et une maquilleuse. Nous voulons avoir un vrai rendu cinéma, ce qui n’est pas tout le temps le cas sur les films de glisse. Le budget global devrait atteindre 50 000 euros.

Actumontagne.com : Quelles sont les qualités requises pour être cadreur sur un film de glisse ?
Thibaud Duchosal : Sans être un pro-rider, un cadreur doit avoir un bon niveau de ski, car on évolue en hors-piste presque en permanence. Après, il faut une bonne communication entre les skieurs et les cadreurs. Lorsqu’ils filment une ligne de loin, le placement est assez évident. En revanche, pour les scènes filmées de près – notamment celles en forêt – je vais dire précisément au cadreur où je compte sauter, faire mon virage,etc, afin qu’il puisse se placer en conséquence.


Actumontagne.com : Quel importance revêt le repérage des spots où vous filmez ?
Thibaud Duchosal : C’est une étape essentielle. Dans les jours qui précédent le tournage, on va tâcher de repérer à quelle heure on a la meilleure lumière, les endroits par où il faut passer. Pour toutes les grandes faces, on fait ce repérage à la jumelle, afin d’avoir un spot immaculé, sans la moindre trace.

Actumontagne.com : Autrement dit, vous n’avez pas le droit à l’erreur…
Thibaud Duchosal : Non. L’exigence est encore plus grande que sur une compétition – Thibaud participe également au Freeride World Tour, le circuit  réunissant les meilleurs skieurs du monde, ndlr – parce qu’ici, on ne peut pas se permettre d’être juste spectaculaire ou engagé. Il faut en plus proposer un ski très fluide, pour l’esthétisme du film. Personnellement, la vidéo m’a beaucoup apporté pour la compétition.

Actumontagne.com : Connaissez-vous beaucoup de ratés sur les tournages ?
Thibaud Duchosal : Pas énormément dans l’ensemble. Lorsqu’il y en a, c’est principalement sur des plans filmés de près, parce qu’inconsciemment, on sait que même si on se rate, on pourra toujours refaire une tentative une dizaine de mètres plus loin. A l’inverse, sur des lignes filmées de loin, on n’a qu’une seule prise possible, parce qu’on veut avoir une face vierge à l’écran. La concentration est alors maximum, ce qui n’est pas toujours le cas sur les scènes filmées de près, comme en forêt par exemple.

Actumontagne.com : Combien de temps faut-il pour tourner un film de glisse ?
Thibaud Duchosal : Environ 20 jours de tournage – principalement sur les Arcs, mais aussi aux Diablerets et à Wengen en Suisse ainsi qu’à Val Grisenche en Italie – seront nécessaires pour ces scènes de glisse. Mais ils seront répartis sur un hiver complet. Nous sommes en permanence à l’affût des bonnes conditions. On consulte au moins trois bulletins différents. Et quand on est sur les Arcs, on consulte aussi les pisteurs qui ont accès à des données plus précises que les bulletins grand public. De plus, il arrive que la station nous ouvre les remontées mécaniques une ou deux heures avant le grand public, afin de pouvoir évoluer sur des spots encore vierges.


Actumontagne.com : Qu’en est-t-il des séquences tournées à l’étranger ?
Thibaud Duchosal : C’est plus aléatoire. Généralement, on part au minimum quinze jours, afin d’avoir au moins une ou deux journées exploitables. Mais ça ne suffit pas toujours : en 2007, j’étais parti un mois en Nouvelle-Zélande. Le temps a été tellement exécrable qu’au final, on n’a pu faire que quatre jours de ski, dont seulement deux exploitables pour le film qu’on tournait alors. Il y a toujours une part de risque.

Actumontagne.com : Qui finance ces films de glisse ?
Thibaud Duchosal : Généralement, chaque rider qui tourne dans le film va apporter une partie des fonds. Sur Invincible, j’ai investi un tiers de mes contrats de sponsoring annuels. C’est un peu à double tranchant : si le film fait un bide, tu auras un peu jeté l’argent par les fenêtres. En revanche, si les retombées sont bonnes, ça te permets de renégocier plus facilement tes contrats de sponsoring à la hausse.

Propos recueillis par Martin Léger

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