Franc soleil, température ni trop fraîche ni trop douce, neige poudreuse à souhait… Les 168 participants de la Pyramide d’Oz, comptant cette année pour la coupe de France de ski-alpinisme, ont bénéficié de conditions idéales pour cette vingtième édition. Reportage.
Dimanche 24 janvier, 7h40 du matin. Le départ est programmé dans vingt minutes. Certains concurrents viennent seulement de récupérer leurs dossards. Les autres ont déjà chaussé leurs skis et enchaînent les allers-retours sur la piste débutant du front de neige d’Oz-en-Oisans. L’ambiance est détendue. Ce qui n’empêche pas de soigner les détails, à l’image de ces skieurs qui raclent le fart qu’ils ont appliqué la veille sur leurs skis. Etrange quand on sait que les participants passent bien plus de temps à la montée – donc avec les peaux de phoque sous les skis – qu’à la descente ? « Non, ça permet notamment d’enlever les peaux plus rapidement, surtout dans l’hypothèse où on aurait une neige un peu collante, qui botte comme on dit dans le jargon », explique Renaud Haberstich, venu d’Arêches-Beaufort avec son coéquipier Serge Berdugo (le parcours A de la Pyramide, c’est-à-dire le plus difficile – 1950 m de dénivelé – se court par équipes de deux).
Malgré un entraînement conséquent – en moyenne trois sorties d’environ 2000 m de dénivelé par semaine, soit 85 000 m de dénivelé cumulé par hiver – les deux Savoyards assurent ne pas « avoir d’objectif particulier, si ce n’est de préparer la Pierra Menta. On est là pour rôder l’équipe, et avant tout pour prendre du plaisir. Cela étant, on essaie de ne pas traîner en route. A la descente, par exemple, peu importe l’esthétique, on tire droit autant que possible. »
Mélanie Piot, engagée sur le parcours B (1250 m de dénivelé, en individuel), est elle aussi venue « pour [se] faire plaisir. » Mais, contrairement à certains concurrents, pour cette jeune femme originaire de Saint-Jeannet (Alpes-Maritimes), « le plaisir, c’est surtout à la descente. On peut dire que la montée est un mal nécessaire ». Bien qu’elle soit inscrite sur une course avec classement individuel, elle est venue avec plusieurs copines du Team Alpi Mercantour. « C’est ma première fois sur la Pyramide. Il n’y a pas de neige dans le Mercantour, donc on vient ici. Je ne suis pas compétitrice dans l’âme, mais comme mon copain est inscrit sur le parcours A avec un collègue, je me suis dit que je pourrais l’accompagner. Le seul objectif, c’est de terminer », confie Mélanie, qui bouclera le parcours dans un temps plus qu’honorable (2h39).
8 heures et des poussières. La corne de brume marque le départ de la Pyramide. Devant, quelques « énervés à quatre poumons » ont lancé la course pratiquement au sprint, tandis que d’autres participants, plus raisonnables (et sans doute moins entraînés !) préfèrent partir au pas. Grâce aux bonnes conditions météo et d’enneigement des derniers jours, les concurrents s’engagent sur un parcours « tracé dans le secteur historique de la Pyramide (Alpette, Perrins Sud et Nord, Dôme des Rousses). C’était une édition facile à organiser », se réjouissait Stéphane Laurençeau, le directeur de course.
Une organisation qui avait toutefois débuté dès le mercredi 20 janvier, avec la dépose du matériel, avant un traçage et un balisage du parcours jeudi, vendredi et samedi, « à raison de plusieurs passages par jour, avec à chaque fois entre 20 et 30 personnes, pour que la trace soit bien faite. La seule petite complication qu’on ait eue, c’est du vent le samedi, ce qui a déplacé de la neige qui a un peu recouvert les traces. Du coup on a refait un traçage le dimanche vers 5h30 – 6h du matin. »
A l’arrivée, un large sourire barrait le visage de tous les participants. « C’était vraiment un très beau parcours, avec des montées bien raides, tout comme les portages. Il ne faisait pas froid, ce qui évite que l’eau gèle dans le Camelback (poche à eau avec pipette), ce qui arrive sur certaines courses ! Les descentes aussi étaient très agréables. J’ai vraiment pu débrancher le cerveau, et me dire qu’il fallait juste perdre du dénivelé le plus vite, sans prêter attention au style », explique Onil Bosco, une autre fille du Team Alpi Mercantour.
Les Grenoblois François Borghese et Benoît Duverlie, des habitués de l’épreuve (il s’agissait de leur quatrième participation), étaient eux aussi enchantés. « Certes, le début est compliqué, parce qu’il y a du monde et quelques passages raides. Du coup, quand on veut doubler, ça fait un effort un peu violent. La deuxième partie était plus agréable. Globalement, ce qu’on a apprécié, c’est que la Pyramide propose un vrai parcours de ski-alpinisme, avec notamment trois passages skis sur le dos, des descentes un peu techniques. C’est bien pour nous, parce que généralement, on arrive à faire un peu de différences en descente ».
Sans surprise, l’épreuve a été remportée par l’équipe composée de l’Italien Philippo Barazzuol et de Léo Viret (membre de l’équipe de France de ski alpinisme) en 1h58 :46, soit quinze minutes d’avance sur leurs dauphins (Bastien Fleury / Marc Amanini). « Avoir deux équipes de très haut niveau – Barazzuol / Viret, et les Italiens Lenzi / Eydallin, malheureusement contraints à l’abandon, toutes deux capables de remporter des coupes du monde ou la Pierra Menta – alors qu’on était simplement une épreuve de coupe de France, c’est déjà très bien. Après, si on veut encore élever le niveau, il faut se positionner sur un événement de dimension internationale », affirme Stéphane Laurençeau. Ce qui pourrait être le cas en 2019, puisque Oz devrait se porter candidate pour accueillir les championnats du monde de ski-alpinisme. « Il s’agirait sans doute d’un dossier commun entre Oz, la Vallée de l’Eau d’Olle et les stations voisines. La Pyramide serait alors l’une des courses de ces championnats du monde. On doit déposer le dossier d’ici mars, avec une décision d’ici l’automne 2016 », précise le directeur de course.
Martin Léger
Résultats
Parcours A : 1. Philippo Barazzuol /Léo Viret en 1h58:46 ; 2. Bastien Fleury / Marc Amanini en 2h13:43 ; 3. Ronan Moalic / Sylvain Montagny en 2h14 :04
Parcours B. : 1. Thomas Pueyo en 1h22:12 ; 2. François Hivert en 1h23 :42 ; 3. Thibault Anselmet en 1h24 :39