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Le plus chinois des moniteurs de ski

Moniteur de ski à l’ESF de Courchevel 1550, Bertrand Camus fréquente assidûment la Chine. Il est convaincu que les stations françaises ont une carte à jouer auprès des Chinois amateurs de ski. Pour qu’ils choisissent la destination France, le moniteur savoyard estime qu’il est indispensable non seulement d’aller les séduire sur place en Chine, mais aussi de former des moniteurs de ski chinois pour s’occuper de cette future clientèle de ce côté-ci des Alpes.

En cette fin de saison d’hiver 2007, qui ici à Courchevel – comme dans toute la Tarentaise d’ailleurs – a été excellente, Bertrand Camus, moniteur de ski à l’ESF de Courchevel 1550, est pourtant un brin désabusé. Depuis trois ans, il s’investit sans compter pour former Liu Yang, 24 ans, à devenir monitrice de ski. En mars dernier, la jeune stagiaire chinoise a raté son test technique. « Je suis déçu car Liu a le niveau requis pour décrocher son brevet d’état», estime son mentor qui se console en regardant le taux d’échecs très élevé de la session à laquelle a participé son élève. « Cet échec n’est pas grave, mais il tombe mal car depuis cette année, je sens que ce projet de former des enseignants chinois et de faire connaître l’industrie française du ski en Chine trouve moins d’échos auprès des professionnels tricolores du ski», constate Bertrand Camus.

Un marché prometteur mais difficile

L’engouement des opérateurs français pour le marché chinois, serait, selon ce fin connaisseur de l’Empire du Milieu, retombé. Certes, cette année encore, Rossignol a financé les billets d’avion de Liu et son matériel de ski, mais pour le reste, Bertrand Camus a dû se débrouiller seul, prendre à sa charge le séjour de la stagiaire chinoise. Comme les deux années précédentes, il l’a accueillie chez lui. « Je l’ai fait avec plaisir car elle est adorable et s’entend bien avec toute la famille, mais cela représente un coût non négligeable pour moi».
Ce que Bertrand Camus regrette le plus dans cette affaire, c’est l’absence de vision à long terme des acteurs français du ski et, somme toute, une approche artisanale du marché chinois. « C’est vrai que les Chinois sont difficiles, qu’il faut beaucoup leur donner pour recevoir très peu, que former des moniteurs, prendre pied sur le territoire prend du temps, mais le potentiel est énorme », affirme Camus qui parle couramment le mandarin et est allé trois fois en Chine ces six derniers mois. « D’ici à dix ans, le nombre de skieurs chinois va exploser ; or si nous, Français, nous ne nous investissons pas maintenant, la clientèle chinoise susceptible de venir en Europe demain, se tournera vers d’autres destinations ski». Et de citer l’Autriche ou la Suisse, deux nations ski elles aussi très séduisantes.

Convaincre l’industrie française d’anticiper

Alors à l’heure où Liu repart en Chine, toujours aussi désireuse d’obtenir le brevet d’état tricolore, Bertrand Camus va-t-il jeter l’éponge ? Négatif ! Au bout de trois ans, le moniteur a noué une relation quasi filiale avec Liu. Cette jeune fille venue de la province de Jilin, proche de la Corée du Nord, a montré qu’elle était déterminée à faire de l’enseignement du ski son métier. A Courchevel, elle a vite été dans son élément, en dépit d’un véritable choc des cultures. « Elle est douée et motivée, je crois en elle ; elle serait ici un excellent relais auprès de la clientèle chinoise et en Chine, un formidable porte-drapeau du ski français ; je vais donc tout faire pour qu’elle revienne l’année prochaine et poursuive sa formation». Si pour l’heure, Bertrand Camus a le sentiment d’oeuvrer seul dans son coin, le moniteur sinophile ne désespère pas de convaincre les opérateurs que son initiative, si elle était menée à grande échelle, serait payante pour le ski tricolore.
Sophie Chanaron

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