Alors que les sommets n’ont pas encore revêtu leur manteau blanc, les premières réservations pour la saison de ski 2025-2026 annoncent une saison globalement stable, mais cachent des dynamiques profondément contrastées. Si le taux d’occupation actuel affiche une avance confortable de 6,1% par rapport à l’an dernier, cette performance est presque exclusivement portée par des vacances de Noël plébiscitées, tandis que le cœur de la saison, en février, montre des signes de faiblesse et que le ski de printemps poursuit sa baisse.
À plus de deux mois du coup d’envoi de la saison, 54% des réservations de l’hiver sont déjà réalisées. Le tableau de bord des stations françaises affiche un taux d’occupation de 35,7%, un chiffre encourageant et en hausse de 6,1%, mais qui masque de fortes disparités. Selon le cabinet spécialisé G2A Consulting, le principal moteur de cette avance est une demande exceptionnellement forte pour les fêtes de fin d’année. La semaine du Nouvel An connaît une progression de 14% des réservations par rapport à la même date l’an passé, au point qu’il est déjà presque impossible de trouver des disponibilités dans le haut de gamme. « Les hébergeurs ont eu raison de positionner cette semaine au plus cher« , commente Denis Maurer, président de G2A Consulting. Cette tendance confirme l’attrait pour un début de saison festif, où le ski n’est d’ailleurs pas l’unique motivation pour 52% des vacanciers présents à cette période.
Février à la peine, janvier en nouvel eldorado
En revanche, le mois de février, traditionnellement le pic de fréquentation, suscite l’inquiétude. Le taux d’occupation global y est en recul de 0,4 point, avec une perspective finale attendue à -4,2% sur les 4 semaines de vacances d’hiver. Si les deux semaines centrales, correspondant aux congés de plusieurs zones et de la clientèle internationale, se maintiennent, la dernière semaine accuse un retard de 14% et la première de de 32%. En cause, des tarifs jugés trop élevés par une partie de la clientèle (française notamment) et un possible report vers le mois de janvier, qui lui est en hausse constante.
Ce mois s’impose en effet comme le nouvel eldorado de l’hiver. De plus en plus de Français et d’étrangers délaissent février et mars pour profiter des semaines de janvier, jugées financièrement plus attractives, et dont l’enneigement est jugé plus fiable par les clients. Depuis 2019, ce mois a vu sa part dans les nuitées totales passer de 24% à 28%, une tendance qui devrait se confirmer cet hiver. Les semaines les moins chères y enregistrent les plus fortes progressions, attirant une clientèle attentive à son budget dans un contexte d’inflation. Depuis plusieurs années, on assiste aussi à l’arrivée de familles avec enfants en janvier, préférant déscolariser leurs enfants pendant une semaine pour pouvoir profiter des tarifs plus abordables à cette période.
La « prémiumisation » de la montagne
Cette redistribution des flux s’explique en grande partie par une hausse des prix bien plus rapide que l’inflation générale. En dix ans, note Gilles Revial, fondateur de G2A Consulting, alors que les prix à la consommation ont augmenté de 19%, les tarifs des forfaits de ski ont bondi de 33% et ceux des hébergements touristiques de 37%. Bien sûr l’offre d’hébergement et les charges ont aussi beaucoup changé. Cette « prémiumisation » de l’offre, si elle séduit une clientèle aisée, notamment pour le Nouvel An, où les prix ne semble pas freiner la demande, contribue à exclure une partie des vacanciers et modifie en profondeur les habitudes de réservation. De fait, il y a dans les stations françaises « de plus en plus d’étrangers et de moins en moins de français » conclue Denis Maurer.
Un calendrier qui a tendance à se rétrécir en fin de saison
La fin de saison confirme ce rétrécissement du calendrier. Le mois de mars reste stable dans les grands domaines d’altitude mais s’effrite dans les stations de charme (-15% de fréquentation depuis 2019). Le ski de printemps, quant à lui, est en forte baisse, avec un recul spectaculaire de 42,6% dans ces mêmes stations de charme depuis 2019, malgré des prix revus à la baisse.
Au final, la prévision pour l’ensemble de la saison 2025-2026 table sur une très légère hausse de 0,2%, synonyme de stabilité dans un contexte où le nombre de lits est en hausse chaque année. Les Alpes du Nord devraient tirer leur épingle du jeu (+0,3%), tandis que les Alpes du Sud seraient stables et les Pyrénées en légère baisse (-0,8%), massif où les réservations sont traditionnellement plus tardives. Une saison stable en apparence, mais dont les équilibres internes en pleine mutation traduisent des mouvements de fond où les saisons tendent à se rétrécir.

