Chez les acteurs de l’économie du tourisme hivernal de montagne, la décision du gouvernement français d’interdire l’ouverture des remontées mécaniques (donc du ski alpin) à l’occasion des vacances de Noël, ne passe pas. Malgré un emploi du temps surchargé, Alexandre Maulin, le président de Domaines Skiables de France, le syndicat qui fédère les quelque 250 exploitants français de remontées mécaniques, a pris le temps de répondre à nos questions.
Actumontagne : Près de dix jours après l’annonce de la fermeture des stations de ski à Noël par le président Macron, dans quel état d’esprit vous trouvez-vous ?
Alexandre Maulin : On aimerait comprendre ! Quelles sont les raisons qui ont poussé le gouvernement à prendre cette décision ? Si on nous explique clairement que la situation sanitaire n’est pas compatible avec une ouverture – en prenant en compte les spécificités région par région – pourquoi pas, mais là, ce n’est pas le cas. Il y a deux jours, Emmanuel Macron a dit qu’il faisait nuit à 17h* en station. Vous savez, j’étais à Paris il y a deux jours, et il fait aussi nuit à 17h là-bas. Avec le froid, je n’ai pas plus envie de rester dehors le soir en ville que lorsque je suis en station. Et les gens s’y regroupent aussi pour manger en fin de journée… On aimerait surtout avoir une vision claire, des dates. A partir de quel moment, de quel seuil de contamination pourrait-on espérer ouvrir ?
Que vous inspirent les sanctions promises à l’encontre des Français qui voudraient aller skier en Suisse, en Espagne ou en Autriche pendant les vacances de Noël ?
Le ski est-il un crime ? Quand je vois qu’on aura le droit d’aller manger au restaurant à Genève, mais pas d’aller skier dans les stations du Valais, je me le demande ! Les gens qui viennent au ski à Noël ne sont pas forcément les mêmes que ceux qui choisissent février, donc il n’y aurait pas automatiquement de report des séjours. D’autant qu’en février, les stations sont généralement déjà bien pleines ! Et ce n’est pas en rendant malheureux nos voisins suisses que cela nous rendra plus heureux. On a simplement besoin aujourd’hui d’avoir un plan de déconfinement clair, avec des étapes précises.
Peut-on d’ores et déjà dire qu’il n’y a aucune chance de voir les domaines skiables français ouverts à Noël ?
Non. Et c’est pour cela qu’on va en justice – un référé-liberté a été déposé aujourd’hui au Conseil D’État, pour faire annuler la décision de fermeture des stations – afin de faire valoir nos droits. La situation actuelle nous plonge dans un véritable marasme économique, on veut au moins savoir comment l’État nous accompagnera pour surmonter cette crise. C’est fatigant de toujours être le dindon de la farce ! Aujourd’hui, aucun texte de loi ne mentionne d’ailleurs cette fermeture des domaines skiables. Il y a juste la parole du Président de la République, et celle du Premier Ministre.
Quid d’une ouverture en janvier ?
Pour l’instant, nous avons posé des questions, mais on n’a aucun scénario de la part du gouvernement, pas de date de réouverture posée. On sent toutefois l’État prêt à compenser le préjudice, et il le faudra puisque 75 % des gens ont annulé leurs vacances de Noël au ski. Encore une fois, il nous faut de la visibilité pour les réservations sur la suite de l’hiver. Parce que sans dates claires, les gens ne vont pas réserver, et ce n’est pas à J-2 qu’ils pourront le faire.
Propos recueillis par Martin Léger
* « On ne peut pas légitimement recommander à nos concitoyens d’aller dans les stations de ski qui sont des lieux de brassage (…) où le soir il fait nuit à partir de 17h et où on se retrouve dans des lieux qu’on a loué à plusieurs et on sait que c’est comme ça que l’on s’infecte », a déclaré le Président de la République à l’occasion d’un point presse, mardi 1er décembre.
Photo de une : l’Alpe d’Huez © Laurent Salino