Face à une pénurie de logements pour les habitants, Bourg Saint Maurice – Les Arcs lance une politique ambitieuse en matière d’habitat. Deux annonces structurantes en témoignent : la régulation des meublés de tourisme, adoptée en conseil municipal, et la création d’une SEM immobilière chargée de développer des logements à l’année. Avec plus de 500 logements aujourd’hui mobilisés pour la location courte durée, la commune de Haute-Tarentaise entend retrouver un équilibre entre hébergement touristique et résidence permanente. Objectif : répondre à l’urgence du logement et soutenir le développement local.
Réguler les meublés de tourisme pour libérer des logements
À partir du 1er novembre 2025, Bourg Saint Maurice instaurera un cadre réglementaire inédit pour les meublés de tourisme, dans le prolongement de la loi Le Meur de novembre 2024. Tout logement destiné à la location courte durée (hors stations classées comme Les Arcs) devra faire l’objet de deux démarches : un enregistrement obligatoire et une autorisation temporaire de changement d’usage valable trois ans et renouvelable. Chaque personne physique ou foyer fiscal ne pourra obtenir qu’une seule autorisation.
Cette mesure, qui exclut les chambres d’hôtes et les résidences gérées de manière centralisée, vise directement les résidences principales et secondaires transformées en Airbnb ou gîtes. Elle s’appliquera au bourg et aux villages, mais pas à la station des Arcs, conçue dès l’origine pour l’accueil touristique sur la base de copropriétés.
« Plus de 500 logements sont aujourd’hui dédiés à la location courte durée sur le territoire, évalue Guillaume Desrues, maire de Bourg Saint Maurice. Ce sont autant de biens inaccessibles à ceux qui souhaitent vivre ici à l’année. » L’enregistrement permettra aussi de mieux connaître le parc immobilier et d’ajuster les politiques locales à la réalité du terrain.
Bourg-Saint-Maurice est le second territoire de montagne a appliquer cette mesure. A partir du 1er mai, les communes de Chamonix-Mont-Blanc, Servoz, Les Houches, et Vallorcine auront également une réglementation plus stricte des meublés touristiques. Tous les meublés de tourisme devront être enregistrés et autorisés à changer d’usage s’ils appartiennent à une personne physique. Par ailleurs, un seul bien en location sera autorisé par personne physique sur les communes de Chamonix-Mont-Blanc et des Houches, et deux à Servoz. A Vallorcine, il n’y aura pas de limitation pour le moment.
Une stratégie habitat globale sur dix ans
Cette régulation s’inscrit dans une stratégie habitat 2025–2035, récemment adoptée par le conseil municipal. L’enjeu est clair : faire de l’habitat permanent une priorité, dans un territoire marqué par la rareté de l’offre et la flambée des prix, liée notamment à la pression touristique.
Première mesure forte : le moratoire sur les constructions touristiques neuves voté dès 2020. L’idée ? Stopper la production de lits froids pour recentrer l’effort sur la rénovation. Un rééquilibrage territorial est aussi engagé, avec la reconversion du quartier des Alpins, ancien projet de logements haut de gamme, en 370 logements à l’année, dont des baux réels solidaires, pour rendre la propriété plus accessible.
Autre levier d’action : la création d’une SEM dédiée au logement, baptisée SEMILAB, qui pilotera la construction et la gestion de nouveaux logements. Le premier chantier démarrera en 2025 avec une résidence de 60 logements pour travailleurs saisonniers à Arc 1800. D’ici 2031, la commune ambitionne de livrer 120 logements supplémentaires, tous destinés à l’habitat permanent.
Encourager la rénovation énergétique et l’accession sociale
Pour agir aussi sur le bâti existant, Bourg Saint Maurice a mis en place un dispositif d’aide à la rénovation thermique. Une subvention communale allant jusqu’à 6 000 € pour les particuliers et 10 000 € pour les copropriétés, cumulée à une exonération partielle de taxe foncière, vise à inciter les propriétaires à isoler leurs logements.
En parallèle, la commune a demandé son classement en zone B1, un statut qui ouvre l’accès à des dispositifs de soutien comme le Pinel ou le Denormandie, facilitant l’investissement locatif sur les logements anciens.
« Réguler, c’est préserver »
Au carrefour des enjeux touristiques et de l’attractivité résidentielle, Bourg Saint Maurice assume un virage stratégique. En agissant sur l’ensemble du spectre – régulation du marché, production de logements accessibles, rénovation énergétique, incitations fiscales – la commune cherche à bâtir un territoire plus équilibré et vivable, où les travailleurs, les familles et les jeunes peuvent se loger décemment, sans être contraints de s’exiler.
Le maire de la commune le martèle : « Car sans logements permanents, pas d’habitants, pas de travailleurs pour assurer le fonctionnement de notre économie et de nos services, ni d’enfants pour faire vivre les écoles. Réguler, c’est préserver ! ».

