La station des 3Vallées revient aux fondamentaux cet hiver, pour rappeler que la sécurité sur les pistes, c’est la promesse de vacances réussies. Et parce que c’est un sujet important, la destination savoyarde aux 2,2 millions de journées-skieurs, a renforcé la sensibilisation en direction des jeunes skieurs, avec une animation pédagogique et ludique innovante, la Ski Patrol Expérience.
« Savez-vous que 80% des plus de 35 ans qui se blessent au ski ne rechaussent jamais ? », lance Benjamin Blanc, directeur du services des pistes des domaines skiables Les Menuires/Saint-Martin et de Val Thorens. Parmi les blessés, les femmes sont majoritaires (60%). Or elles sont des prescriptrices influentes pour les vacances. « Mais si depuis 20 ans le nombre d’accidents sur les pistes fluctuent peu en France, le sentiment d’insécurité a lui fortement augmenté l’hiver dernier », constate Benjamin Blanc, à la tête d’une équipe de 200 pisteurs-secouristes répartis sur les différents secteurs des domaines skiables de la vallée des Belleville (Les Menuires/Saint-Martin et Val Thorens).
Peur des autres et vitesse excessive
La progression de ce sentiment est sans doute à rapprocher de la forte fréquentation post année blanche en sortie de Covid, à un forme d’agoraphobie née des confinements successifs ou encore à la vitesse accrue des skieurs sur des pistes façon boulevard n’offrant plus d’aspérités susceptibles de freiner les Fangio !
Les acteurs de la station des 3Vallées (pisteurs-secouristes, moniteurs, loueurs, office de tourisme) prennent très au sérieux ce ressenti, car si le sentiment d’insécurité et l’accidentologie ne sont pas corrélés, les deux influent sur l’envie de revenir en séjour en montagne. Les skieurs, notamment les jeunes parents redoutent les collisions entre personnes. Elles ne représentent pourtant que 5% des causes d’accidents sur les pistes et sont souvent très médiatisées, à l’image l’an dernier de la mort du comédien Gaspard Ulliel, après qu’il ait percuté un autre skieur. « 80% des gens qui se blessent sur les pistes ont fait une chute isolée », souligne assure Benjamin Blanc.
La Ski Patrol Expérience pour sensibiliser dès l’enfance
Parmi les nombreuses initiatives de la destination savoyarde en lien avec la thématique de la sécurité à ski, la Ski Patrol Expérience. Une animation inédite, à la fois pédagogique et ludique, imaginée par Benjamin Blanc, dont le but est de sensibiliser sur le sujet dès le plus jeune âge (7-14 ans). Les enfants découvrent à travers plusieurs ateliers l’envers du décor d’un domaine skiable, et le métier de pisteur-secouriste, dont « seulement 10% du temps est consacré au secours », explique Jean-Marc Ambre, maître pisteur-secouriste. Les autres missions de ces anges-gardiens, moins visibles ou moins spectaculaires, relèvent de l’accueil et de la prévention.
« Nous expliquons aux jeunes participants ce qu’est une piste de ski, le matériel qu’on y trouve (jalons, balises, filets, banderoles…), et à quoi il sert, quel numéro de secours composer si l’on est victime ou témoin d’un accident », détaille le formateur. En l’occurrence celui du central des pistes des Menuires/Saint-Martin, inscrit sur le forfait de ski et sur les balises des pistes (Ndlr : le 04 79 00 73 00). L’atelier pédagogique sensibilise également les apprentis pisteurs-secouristes aux dix règles de sécurité du skieur, sur lesquelles les professionnels ont conscience qu’il faut se répéter et renforcer la communication.
Simulation d’un héliportage
Cette heure et demi d’immersion dans le quotidien des pisteurs-secouristes permet de faire passer des messages de prévention de manière vivante, concrète et positive. Parmi les mises en situation phares, une simulation d’héliportage, l’hélicoptère étant un outil indispensable dans les secours graves ou pour les déclenchements d’avalanche dans certaines zones.
Dans l’atelier organisé dans le DVA Park (Détecteur de Victime d’Avalanche), les enfants vont apprendre comment se forme la neige, pourquoi il y a des avalanches, leurs différents types et quels sont les équipements indispensables pour pratiquer le hors-piste. « Dès que vous sortez d’un jalon, vous êtes en hors piste et donc pas à l’abri d’un danger, même en bordure de piste », prévient Jean-Marc Ambre, rappelant que le risque zéro n’existe pas. « Nous les sensibilisons à l’échelle du risque d’avalanche comprenant cinq niveaux, puis nous leur faisons faire une petite recherche DVA, en insistant sur la nécessité de s’équiper de cet appareil ainsi que d’une pelle et d’une sonde dès que l’on fait une sortie hors-piste ».
Une initiative pédagogique et ludique saluée
Enfin, cerise sur le gâteau pour les apprentis pisteurs-secouristes, la séance se termine par un parcours en mini-motoneige électrique, autre engin familier du métier avec les drones, de plus en plus utilisés pour inspecter certaines pentes. Sans oublier la remise d’une médaille, validant cette expérience inédite, saluée par les professionnels de la sécurité, comme Pascal Sancho, 30 ans de secours en montagne dans les unités CRS de la police nationale, aujourd’hui écrivain et conférencier. Idem pour Claudia Riegel-Deneriaz, en charge de la communication chez Recco, la marque leader de la sécurité en montagne avec ses réflecteurs intégrés aux vêtements de ski ou aux accessoires. « Les jeunes sont très demandeurs de ce genre d’expérience interactive, ils ont envie d’apprendre, considérant que c’est valorisant pour eux », témoigne celle qui participe à de nombreux événements plébiscités par les jeunes, où Recco fait de la sensibilisation.
Le seul bémol de la Ski Patrol Expérience, son prix, 43€, que la régie des pistes justifie par la qualité des intervenants et la densité de son contenu. Il y a sans doute des solutions à imaginer pour la rendre plus accessible à l’avenir, afin qu’elle fasse des émules dans d’autres stations des Alpes.
Des pisteurs géolocalisés
Avec 200 personnes, le service des pistes de la vallée des Belleville – sous l’autorité du maire de la commune et autonome par rapport aux deux sociétés de remontées mécaniques, la Sevabel et la Setam – est le plus important de France. À ce titre, il se veut moteur dans le domaine de la sécurité et de la prévention des risques. Depuis sept ans, la digitalisation des domaines skiables de la vallée a beaucoup progressé. Elle a même transformé le quotidien des pisteurs-secouristes, désormais tous géolocalisables au mètre près. Elle permet de générer de nombreuses données en temps réel qui vont faciliter la prise de décision lors d’un secours et anticiper la prise en charge d’un blessé par le cabinet médical local avec lequel le service est connecté.
« Avec ces datas, nous établissons aussi chaque semaine une cartographie des différents secteurs pour identifier les endroits posant problème, et voir comment améliorer la situation, avec par exemple une présence accrue des pisteurs-secouristes (la peur du gendarme pour lever le pied, ça marche aussi sur les pistes!), l’élargissement du damage ou une canalisation des flux, en attendant des travaux sur la piste l’été au besoin », explique Benjamin Blanc, indiquant que les accidents commencent à se produire au-delà de 26 skieurs par hectare. « Nous expérimentons avec succès des panneaux lumineux donnant des informations sur la fréquentation des pistes pour inciter les skieurs à privilégier d’autres itinéraires moins fréquentés ». Et ainsi faire baisser ce ratio.
Hors-piste : DVA et Recco !
Le service des pistes des Menuires s’est associé à Recco pour sensibiliser les skieurs adeptes du ski hors piste (mais aussi de sorties raquettes en autonomie) sur la sécurité. Et en particulier sur la nécessité d’être rapidement localisables s’ils sont pris dans une avalanche. Comme le rappelle Pascal Sancho, ancien secouriste en montagne, instructeur pour la marque suédoise Recco, « une avalanche, c’est une course contre la montre pour les secours, sachant que les chances de survie d’une personne ensevelie sont de l’ordre de 15 à 30 minutes ».
D’où l’importance d’avoir dans son sac à dos un détecteur de victime d’avalanche (DVA), une pelle, une sonde, mais aussi d’être équipé d’une pastille Recco. De Decathlon/Wedze à Armani en passant par Millet ou Cébé, plus de 150 marques intègrent dans leurs gammes de vêtements et d’accessoires ce réflecteur passif, inventé il y a 40 ans. Il ne remplace pas le DVA, -que les skieurs ne doivent cependant pas oublier d’activer-, mais le complète.
En l’absence de ces outils de détection des personnes, les secours doivent sonder avec des perches, la zone couverte par l’avalanche. « Or, il faut une heure pour sonder l’équivalent d’un terrain de foot », indique Pascal Sancho. Avec un DVA ou un détecteur Recco -25 exemplaires en équipent les services des pistes sur les 3Vallées-, il faut cinq minutes pour couvrir la même surface. « En France, 135 organisations de secours possèdent des détecteurs Recco », précise Claudia Riegel-Deneriaz, responsable communication de Recco.
Les Menuires, en partenariat avec Recco, proposent encore deux soirées Safety After Ski pour participer à un exercice grandeur nature de recherche d’avalanche et échanger avec les pros du secours. Rendez-vous les 14 mars et 18 avril sur la Croissette (accès libre).