S’ils ont forgé leur image avec du ski de poudreuse et des dénivelés parmi les plus importants au monde, les Grands Montets -Les Grands pour les initiés- ne sont pas réservés aux seuls skieurs chevronnés. Le domaine, privé provisoirement de son accès sommital par téléphérique, offre aussi du ski facile et ludique pour grands et petits. Focus sur ce spot mythique des Alpes, avec Olivier Vezinhet, directeur du site à la Compagnie du Mont-Blanc.
Actumontagne : Faut-il être forcément un bon skieur pour skier aux Grands Montets ?
Olivier Vezinhet : Tout le monde peut skier aux Grands Montets ! Comparé aux deux autres domaines de la vallée de Chamonix, Brévent-Flégère et Balme, le site des Grands Montets exposé nord et en haute altitude, est effectivement taillé pour le grand ski. Mais pas seulement. Il compte aussi plusieurs zones tous publics. L’an dernier, nous avons même créé un espace débutant d’altitude pour répondre à deux phénomènes. L’enneigement de plus en plus aléatoire en fond de vallée, en raison du réchauffement climatique et le souhait de la clientèle de profiter du temps des vacances pour se retrouver. En montant en altitude notre espace débutants, nous le sécurisons. En l’installant au cœur du domaine skiable, nous permettons à nos clients de skier ensemble ou à proximité.
Actumontagne : Cet espace n’a pas pu prendre toute sa mesure l’an dernier. Pourquoi ?
OV : La mise hors service du téléphérique des Grands Montets, suite à l’incendie survenue à la gare intermédiaire de Lognan en septembre 2018, a empêché les primo-débutants d’y accéder. Cet espace a été conçu pour être accessible à pied depuis la gare intermédiaire du téléphérique de Lognan. Or, en arrivant désormais sur site uniquement via la télécabine de Plan Joran, il faut emprunter une piste « bleu foncé » pour aller sur cette zone dédiée aux débutants. Inenvisageable pour les personnes n’ayant jamais chaussé les skis. L’an dernier, les débutants de niveau 2 ont néanmoins fréquenté les lieux. Nous avons également aménagé en urgence une piste de snowtubbing (bouées sur neige) desservie par le téléski des Petits Marmottons et elle a bien plu.
Actumontagne : Pourquoi n’avez-vous pas reconduit l’activité cette saison ?
OV : Le système d’accrochage des bouées aux perches de notre fournisseur ne dispose pas de l’agrément ad hoc ! Du coup, avec notre partenaire H05, qui s’occupe de nos espaces nouvelles glisses, nous avons entrepris une démarche d’agrément. Elle aboutira pas avant la saison prochaine. En attendant, pour ces vacances d’hiver 2020, nous avons installé des petits modules ludiques très faciles, accessibles par le téléski. Au printemps, nous prévoyons de proposer à nouveau une activité fun sur le secteur en utilisant des luges plus conventionnelles.
Actumontagne : Le domaine des Grands Montets dispose d’un boardercross facile et de nombreux dispositifs vidéo. Cette expérience digitale est-elle plébiscitée ?
OV : Absolument. Le boardercross de niveau bleu permet de faire un départ à quatre simultané. Les riders sont filmés et peuvent télécharger leur vidéo en créant leur profil sur notre site Internet. Nous enregistrons 5000 passages en moyenne chaque semaine et jusqu’à 8000 en très haute saison. Nous avons aussi un départ filmé sur une zone freeride avec une caméra qui vous suit dans votre évolution. Vous pouvez aller récupérer toutes vos vidéos et même découvrir sous la forme d’une courbe le parcours et vos dénivelés de la journée.
Actumontagne : Les Grands Montets ont néanmoins perdu de leur superbe auprès des amateurs de grands dénivelés et de ski hors-piste. Vous confirmez ?
OV : S’ils ne chaussent pas les peaux de phoque au départ du sommet de la télécabine de Bochard pour atteindre le point culminant du site à 3300 mètres, ces skieurs sont effectivement privés de la moitié de l’offre de ski hors piste des « Grands ». Et notamment de leur partie haute montagne et la plus sauvage qui les attiraient. Mais pour ceux qui skient sur les pistes, l’arrêt du téléphérique des Grands Montets n’a finalement enlevé que deux pistes noires. Avant le sinistre, il était possible de faire plus de 2100 mètres de dénivelé de descente. Aujourd’hui, en partant de 2765 mètres pour arriver à 1200 mètres, vous faites quand même 1565 mètres de dénivelé sans reprendre une remontée.
Actumontagne : A combien évaluez-vous la baisse de la fréquentation du site ?
OV : L’an dernier, le domaine a enregistré une baisse de 18% en consommation de journées skieur sur l’hiver précédent, très mauvais en raison notamment de la tempête Eleanor. Si l’on compare à la moyenne des cinq derniers hivers, le recul est de 30%. Il y a donc une vraie baisse structurelle liée au sinistre qui impacte l’attractivité du site. La collectivité de Chamonix et la Compagnie du Mont-Blanc partagent le sentiment d’une nécessité absolue de reconstruire un appareil favorisant une offre quatre saisons aux Grands Montets. Le dossier de reconstruction est néanmoins complexe car il s’agit d’un sinistre, et que pour l’heure, nous ne connaissons pas le montant de l’indemnisation à laquelle nous avons droit.
Actumontagne : La ligne de remplacement, estimée à plus de 100 M€ pourrait au mieux être mise en service en 2023, selon votre pdg Mathieu Dechavanne. Confirmez-vous que l’architecture des gares sera signée par Renzo Piano ?
OV : Effectivement le célèbre architecte italien a répondu favorablement à notre sollicitation. Nous allons construire pour les 50 années qui suivront la mise en service des installations, il faut donc un objet à la hauteur du prestige des lieux et qui marque son époque. La gare de départ de l’Aiguille du Midi, redessinée par Jean-Michel Wilmotte il y a quelques années est extrêmement photographiée, contribuant ainsi à la notoriété de notre destination.
Propos recueillis par Sophie Chanaron
Pratique : Pour skier aux Grands Montets, forfaits Chamonix Le Pass (Vallée de Chamonix) ou Mont-Blanc Unlimited