Les Italiens Matteo Eydallin et Damiano Lenzi chez les hommes, Laetitia Roux et Emelie Forsberg chez les femmes, ont littéralement survolé la 32e Pierra Menta. Parmi les spectateurs venus à peaux de phoques encourager ces « fusées », comme tous les concurrents de la dernière étape de la course de ski-alpinisme du Beaufortain, une cordée de spectatrices, en rémission d’un cancer du sein, aux couleurs de l’association A chacun son Everest. Une ascension forte en symboles, et l’un des temps forts de cette édition 2017.
C’est toutes de rose vêtues que Laetitia Roux et Emelie Forsberg ont disputé la quatrième et dernière étape de la Pierra Menta 2017. Un clin d’oeil à la couleur qui symbolise partout dans le monde le combat contre le cancer du sein, et qui, cette année, s’est invité à la légendaire course de ski-alpinisme d’Arêches-Beaufort ? Peut-être ! En effet, mêlées aux 4000 fans montés à l’aube en ski de randonnée au col de la Forclaz, passage clé des compétiteurs sur l’étape dite du Grand Mont, huit femmes de l’association A Chacun son Everest, toute banderole et ballons roses flottants dehors ! Elles aussi ont chaussé les skis de rando (depuis le sommet du télésiège des Bonnets Rouges) pour aller acclamer les forçats des cimes. Une montée de près de deux heures qui représente bien plus qu’un exploit sportif pour ces femmes âgées de 30 à 50 ans.
Elles ont en commun d’avoir été atteintes d’un cancer du sein et d’avoir fait un séjour « réparateur » chez le docteur Christine Janin, la première Française à avoir gravi l’Everest en 1990. Depuis plus de 20 ans, au sein de l’association qu’elle a fondée, la médecin de Chamonix accompagne les enfants et les femmes dans leurs parcours d’après-cancer pour guérir mieux en pratiquant, entre autres, des activités de montagne.
Comment ce groupe joyeux et rayonnant auquel se sont joints famille et amis, est-il arrivé sur ce lieu de convergence des spectateurs de la Pierra Menta, où l’ambiance est digne d’un Tour de France ? A force de courage, de dépassement de soi et d’esprit d’entraide, valeurs chères aux fondateurs de la course du Beaufortain.
A l’origine de cette aventure sportive et humaine, les organisateurs de la Pierra Menta, qui désiraient depuis longtemps l’associer à une belle cause, et Laurence Dirette. Cette quadra d’origine belge, Arêchoise depuis 13 ans, atteinte d’un cancer il y a trois ans, est revenue transformée d’un stage effectué en novembre dernier chez Christine Janin. « J’en ai rapporté une boîte à outils qui m’a permis de lâcher prise, de reprendre confiance en moi, de retrouver une énergie positive, de me réapproprier mon corps, comme toutes les autres femmes de la cordée qui ont séjourné chez Christine », témoigne Laurence, à qui les organisateurs de la Pierra Menta ont fait part de leur volonté de donner une dimension caritative à la course.
« Contribuer à l’action d’A Chacun son Everest pour rendre à Christine Janin, à son équipe et aux bénévoles qui l’accompagnent, s’est imposée comme une évidence », explique Laurence. Elle a très vite réuni autour d’elle d’autres femmes au parcours similaire, elles aussi désireuses de participer au combat de l’association qui aide à remettre les femmes en mouvement, à dépasser la maladie. « Nous avons décidé de collecter des fonds pour l’association à l’occasion de la Pierra Menta, en vendant des mousquetons siglés A Chacun son Everest et Pierra Menta ». Une quinzaine de femmes se sont relayées pour tenir pendant quatre jours le stand au village des exposants. Un stand où nombres de coureurs ont témoigné leur solidarité, plusieurs collant même un sticker de l’association sur leur casque, geste qui les a beaucoup touchées.
Un petit groupe de ces femmes emmené par Laurence, a également souhaité aller en ski de randonnée au col de la Forclaz. Leur Everest à elles. Notre consoeur Catherine Claude a suivi cette ascension de l’intérieur en vue d’un reportage pour le prochain magazine du Beaufortain, Versants. « Elles sont toutes arrivées en haut, sans exception, le groupe se calant sur les moins rapides. Pour celles qui n’avaient jamais chaussé les skis jusque-là, c’est un véritable exploit », explique la journaliste, encore bluffée par la force mentale de ces femmes et du lien qui les unit. « Elles étaient magnifiques, bienveillantes les unes envers les autres. Le lever du jour sur la Pierra Menta (ndlr : la montagne qui a donné son nom à la course), a été un véritable émerveillement et un moment de partage d’une grande intensité, sûrement très symbolique pour elles ».
Elles resteront elles aussi les héroïnes du jour, comme Laetitia et Emelie !
sophie Chanaron