Critérium du Dauphiné : « Dur de dégager un favori »

En l’absence des deux grands favoris du prochain Tour de France – les Slovènes Primoz Roglic et Tadej Pogacar – le 73e Critérium du Dauphiné, qui s’élance dimanche 30 mai d’Issoire pour s’achever une semaine plus tard aux Gets, s’annonce très ouvert. Après cinq premières journées dévolues aux sprinters et baroudeurs (à l’exception du contre-la-montre de la quatrième étape), la décision devrait s’opérer lors des trois dernières étapes de montagne, qui arriveront respectivement au Sappey-en-Chartreuse le 4 juin, à La Plagne le 5 juin et aux Gets le 6 juin. Bernard Thévenet, l’ancien double vainqueur du Tour de France et directeur de l’épreuve, décrypte cette édition 2021.

Actumontagne.com : Après une édition 2020 raccourcie à cinq jours en raison de la refonte du calendrier due à la crise sanitaire, on revient cette année à un format classique…
Bernard Thévenet : Oui, parce que le Critérium du Dauphiné fonctionne bien ces dernières années, donc autant rester dans ce qui fait sa force. C’est à la fois une formule traditionnelle, mais qui prend aussi en compte les évolutions récentes du cyclisme, notamment un kilométrage plus court des étapes.

David Gaudu, 8e de la Vuelta en 2020 (avec deux victoires d’étapes) sera l’une des meilleures chances françaises sur le Dauphiné © Gomez Sport

Ce kilométrage réduit concerne notamment le contre-la-montre (16,4 km entre Firminy et Roche-la-Molière, mercredi 2 juin lors de la 4e étape). Pourquoi ?
Par rapport aux différentes contraintes (villes de départ et d’arrivée, qualité des routes empruntées, absence de passages à niveaux,etc), on avait le choix entre faire un contre-la-montre de 32 km ou un de 16 km. Nous avons pensé que 32 km aurait été trop long, et aurait donné un trop gros avantage aux rouleurs, ce qui aurait pu figer la course par la suite. Aujourd’hui, les écarts entre favoris sont plus ténus lors des étapes de montagne, alors il faut éviter de donner trop d’avantage aux rouleurs, pour une question d’équilibre. On a opté pour une distance plus courte, de manière à simplement pouvoir dégager une hiérarchie.

La première grosse explication entre cadors pourrait intervenir lors de la sixième étape, vendredi 4 juin entre Loriol-sur-Drôme et le Sappey-en-Chartreuse. A quel scénario vous attendez-vous ?
C’est assez dur de faire des prévisions sur cette étape. Le profil n’est pas hyper sélectif*, mais il peut néanmoins favoriser les tentatives d’échappées et les attaques. C’est parfois quand c’est moins dur sur le papier qu’il y a le plus de bagarre. Et l’absence d’une équipe capable de cadenasser la course – comme la Jumbo-Visma de Roglic en 2020, lequel fait l’impasse cette année – devrait rendre la course plus ouverte.

Bernard Thévenet, directeur du Critérium du Dauphiné © ASO – B.Bade

Quand on étudie le tracé des trois dernières étapes, on serait tenté de dire que l’étape du samedi 5 juin, qui arrive à la Plagne**, est l’étape-reine de cette édition. C’est aussi votre avis ?
Il s’agit en effet de l’étape la plus dure en termes de relief. Il est aussi vrai qu’il y a quelques années en arrière, la grosse bagarre entre cadors avait plutôt lieu sur l’avant-dernière journée de course. Mais au cours des trois dernières éditions, on a eu une dernière journée très animée, qui a débouché sur un changement de leader. D’autant qu’il y a quand même de quoi faire des écarts le dimanche entre la Léchère et les Gets, notamment avec l’ascension de Joux-Plane (11,6 km à 8,5 %) dont le sommet se situe à 17 km de l’arrivée. Et de toute façon, davantage que le profil d’une étape, c’est l’allure à laquelle elle se court qui rend la course plus ou moins dure. Parfois, ce sont sur des étapes a priori moins difficiles qu’il y a le plus d’écarts, notamment parce que les favoris s’y attendent un peu moins.

L’Australien Richie Porte, 2e de l’épreuve en 2013 et en 2017, fait partie des favoris de l’édition 2021 © ASO – Gautier Demouveaux

Parlons justement des favoris. En voyez-vous un qui se dégage clairement ?
Non, d’autant que ni Pogacar ni Roglic (respectivement vainqueur et deuxième du dernier Tour de France) ne seront présents. Après, il y aura tout de même du beau monde, avec Tao Geoghegan Hart (le vainqueur du Giro 2020), Geraint Thomas, Richie Porte (toujours très bon sur les courses d’une semaine), Nairo Quintana, Alejandro Valverde, Steven Kruijswijk, Miguel Angel Lopez, David Gaudu, Guillaume Martin ou Warren Barguil. Mais comme il n’y a pas vraiment eu de confrontations directes entre ces favoris cette saison, c’est un peu dur de dire s’il y en a un au-dessus du lot. Alors certes, le plateau peut sembler un petit moins relevé que ces dernières années, mais ce n’est pas forcément une mauvaise chose pour l’épreuve. L’intérêt de la course, c’est aussi qu’il puisse y avoir des tentatives d’échappées et des surprises. Cela semble possible cette année.

Propos recueillis par Martin Léger

Guillaume Martin, 3e du Critérium du Dauphiné en 2020, sera l’un des prétendants au podium, voire à la victoire. © Gomez Sport
  • *Après 114 km plutôt plats, l’étape entre Loriol-sur-Drôme et le Sappey (167,2 km au total) propose un enchaînement des cols de la Placette (5,9 km à 6,4 %), du col de Porte (7,4 km à 6,8 %), de la côte de la Frette (3,7 km à 5,4 %) et la montée finale au Sappey (3,3 km à 6,2 %).

** Longue de 171,1 km au départ de Saint-Martin-le-Vinoux (Isère), cette étape comporte quatre ascensions répertoriées pour le classement de la montagne : la côte de Venthon (2,5 km à 4,8%), le col du Pré (12,6 km à 7,7 %), le Cormet de Roselend (5,7 km à 6,5 %) et la montée finale sur La Plagne (17,1 km à 7,5 %).

Photo de une : Vainqueur du Tour de France en 2018, le Britannique Geraint Thomas avait quelques semaines auparavant remporté le Critérium du Dauphiné. Récidivera-t-il en 2021 ? © ASO – Pauline Ballet

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